ActualitésConseil Municipal

Eric Piolle confirme que le jumelage entre Grenoble et Rehovot est toujours suspendu

Au Conseil municipal du 23 juin 2025, le groupe Grenoble en Commun a adressé une question orale au Maire Eric Piolle au sujet des relations entre la Ville et les territoires israélien et palestinien.

 

La réponse du Maire Eric Piolle :

« Votre question s’inscrit dans un contexte dramatique et douloureux pour le Moyen-Orient. Ces derniers jours, l’attaque d’Israël contre l’Iran a provoqué une grave escalade dans une région déjà à feu et à sang. Nous pensons aux victimes civiles de Téhéran, de Tel-Aviv, de Rehovot, mais aussi de Tamra, ville arabe israélienne, qui ne dispose d’aucun abri pour sa population. Hier, les États-Unis ont bombardé trois sites nucléaires iraniens, réduisant à néant les espoirs d’apaisement et compromettant durablement toute tentative de désescalade diplomatique. L’enchaînement des violations du droit international dans l’objectif d’une escalade sans fin. Et partout, cet enchaînement est patent.

Mais cette nouvelle spirale de violence ne doit pas et ne nous fait pas oublier le drame de Gaza, où un blocus humanitaire met en danger la vie de centaines de milliers de personnes. L’interception récente de la Flottille de la liberté dans les eaux internationales et l’empêchement de la marche sur Gaza organisé depuis l’Egypte ont rappelé au monde l’ampleur de cette crise humanitaire, et les violations répétées du droit international par le gouvernement israélien. Nous avons toutes et tous au cœur, ces dizaines, parfois ces centaines de morts à Gaza tous les jours. Même si maintenant ils semblent éclipsés dans les médias, nous ne les oublions pas.

En France, comme à Grenoble, nous sommes nombreuses et nombreux à être touchés, en colère et bouleversés par ce conflit, à être au quotidien, à vivre avec ce poids, en pensant à ces victimes, en pensant à cette situation profondément injuste. Plus de 50 000 morts à Gaza dont plus de 15000 enfants, des centaines de milliers de blessés, des familles dévastées. Ce massacre de masse suscite chez chacune et chacun d’entre nous une émotion profonde. Cela nourrit un sentiment très profond d’impuissance face à cette l’horreur. Nous le disons, c’est maintenant vital : la France doit agir et reconnaître l’État de Palestine.

Cette reconnaissance, actée déjà par 150 pays, ouvre la voie de la solution à deux états. C’est ce que ce conseil a voté ici même : la demande dans un vœu que la France reconnaisse l’État de Palestine. Je le rappelle, cela a déjà été voté par l’Assemblée et par le Sénat et il y a maintenant dix ans. Nous l’avons fait en demandant la libération des otages, en demandant un cessez-le-feu immédiat. Nous l’avons fait parce que nous avons la paix au fond de notre cœur.

Cette reconnaissance interviendrait à un moment où Benyamin Netanyahou cherche à ce qu’il n’y ait pas de témoins. Qu’ils soient humanitaires ou politiques : c’est ainsi qu’il y a quelques semaines, deux adjoints de la Ville de Grenoble se sont vu interdire l’entrée sur le territoire israélien. Trois jours avant leur départ, les autorités israéliennes ont unilatéralement annulé leurs visas, sans fournir la moindre explication. Ils devaient participer à la célébration des 30 ans de la coopération décentralisée franco-palestinienne, avec une délégation de 50 collectivités conduite par Cités Unies France et invitée par le consulat général de France à Jérusalem : un événement hautement symbolique, encore plus cette année. J’y étais moi même il y a deux ans. Les autorités israéliennes l’ont ainsi empêché.

Venons-en maintenant à la question du jumelage.

Historiquement, Grenoble est jumelée avec deux villes : Rehovot, en Israël, et Bethléem, en Palestine.

Le jumelage avec Bethléem est vivant et actif. En mai 2023, une délégation grenobloise s’est rendue sur place. J’en étais. Nous y avons rencontré notre partenaire Anas Abu Srour, directeur du centre de jeunes du camp d’Aïda, plus tard arrêté puis détenu pendant plusieurs mois par l’armée israélienne, ainsi que le président du centre des jeunes du camp d’Aïda : nous n’arrivons pas à les reconnaître à leur sortie de prison. C’est avec une grande émotion que nous avons accueilli en juillet 2024 des jeunes Palestiniens venus du camp de réfugiés en Cisjordanie, après notre visite en 2021. Aujourd’hui, plusieurs projets concrets sont actuellement en cours, en particulier dans les domaines du patrimoine, de la jeunesse et du sport féminin, et sont co-financés par l’Etat français via les dispositifs de coopération décentralisée. D’ailleurs, c’est un point à souligner sur les doubles discours parfois de l’État français qui, on l’a vu avec la polémique sur les livraisons d’armes très récemment, qui cofinance également des dispositifs de coopération décentralisée, dont celui entre Grenoble et Bethléem.

Concernant Rehovot, deux rappels s’imposent :

Le jumelage avec Rehovot est suspendu sine die depuis plusieurs années. Il n’existe aujourd’hui aucun lien institutionnel entre nos deux collectivités. Cette suspension sine die est confortée par notre délibération-cadre internationale 2023–2028, qui inscrit la défense des droits humains comme l’un des piliers fondamentaux de notre action.

En octobre 2023, j’ai soutenu la création d’un nouveau comité de jumelage citoyen, composé de Grenobloises et de Grenoblois. Ce comité s’est réuni, et a considéré – je le cite – qu’il n’était ni possible, ni souhaitable de se constituer ni de démarrer des travaux tant qu’il n’y aurait ni cessez-le-feu, ni libération des otages.

Nous pouvons donc dire aujourd’hui qu’il n’y a ni lien institutionnel, ni même travail citoyen entre Grenoble et Rehovot.

Tout cela ne répond pas à la question pour nous aujourd’hui : que pouvons nous faire et que pouvons nous faire de plus, pour marquer notre soutien aux Gazaouis, pour marquer notre soutien aux Palestiniens, pour marquer ce soutien à ce désir de paix et à ce respect du droit international ?

Promouvoir la culture et l’histoire palestiniennes, notamment à travers le Mois de la Palestine actuellement en cours à la Maison de l’international jusqu’en juillet. J’invite chacun et chacune à s’y rendre, à s’emparer de ces espaces de culture, à faire vivre ces voix. C’est important parce qu’il ne faut pas réduire les Palestiniens à l’oppression qu’ils subissent aujourd’hui, aux massacres qu’ils subissent aujourd’hui. Il faut faire vivre cette culture et entretenir cette culture.

Continuer à œuvrer pour la reconnaissance de l’État palestinien, comme je l’ai fait la semaine dernière encore, lors d’une conférence de presse à Paris, au nom de la Ville de Grenoble, pour appeler le Président de la République à franchir ce pas, qui serait déterminant.

Rappeler ici, solennellement, devant ce Conseil municipal, comme je viens de le faire, la suspension sine die du jumelage entre Grenoble et Rehovot, en cohérence avec notre histoire, notre engagement pour les droits humains, en cohérence avec le comité de jumelage citoyen.

Mandater mon adjoint à l’international pour qu’il vous présente en septembre une délibération proposant un soutien financier à des associations ou ONG locales, qu’elles soient israéliennes ou palestiniennes, œuvrant concrètement pour la paix.

Je le charge également de poursuivre les recherches et les contacts en vue de développer des nouveaux partenariats de coopération avec des territoires résolument engagés pour la paix, dans la région.

Organiser une conférence publique sur l’antisémitisme à l’Hôtel de Ville.

Car depuis le 7 octobre 2023 et les attentats terroristes perpétrées par le Hamas, au cours desquelles des centaines de civils israéliens ont été massacrés ou capturés, nous assistons en France à une recrudescence alarmante de l’antisémitisme, alimentée par des amalgames insupportables et une stigmatisation dangereuse que nous condamnons fermement. C’est aussi le sens de notre plan de lutte contre les discriminations présenté dans cette enceinte. Nous ne relativiserons jamais le poison mortel de l’antisémitisme : en tant que Ville Compagnon de la Libération, cette lutte fait partie intégrante de notre histoire et de notre identité. C’est ce que je rappellerai le 29 juin lors de la remise du prix Louis Blum, qui sera également un temps de discussion avec les associations représentatives de la communauté juive. Nous le rappellerons toujours : le judaïsme est plus qu’une religion et nous luttons toujours contre les amalgames, amalgames qui feraient de tout juif un citoyen israélien et de tout citoyen israélien un soutien de Benjamin Netanyahou.

Merci donc pour cette question, qui rappelle l’importance d’agir, ici aussi, à notre échelle, une échelle bien humble face l’horreur, pour porter les valeurs universelles de paix, de justice, et de dignité humaine.

Je veux aussi rappeler l’importance de ne pas essentialiser et amalgamer les peuples. Et nous pouvons être témoins du nombre de personnes qui œuvrent pour la paix, qui œuvrent pour la solution à deux États.

Merci de votre question. Merci de votre attention sur ce sujet éminemment douloureux pour l’ensemble de l’humanité. Je vous remercie. »

 

La question orale du groupe Grenoble en Commun :

 

x  Powerful Protection for WordPress, from Shield Security
Ce Site Est Protégé Par
Shield Security